CHAPITRE XI - Formation et cheminement dans la communauté chrétienne


Dans ce chapitre nous allons voir que pour adopter un modèle qui lui permette de se concentrer sur ses fonctions propres et de proposer un salut intégral, l’Église devra s’organiser pour offrir à ses membres un cheminement de libération par étapes. Le modèle implique à la fois de se munir d’une structure de cours[1] assurant la formation et la croissance des membres et à la fois de créer des activités missionnaires pour combattre efficacement les pauvretés[2]et les souffrances du milieu. Tout en correspondant aux fonctions propres de l’Église, les activités de la communauté chercheront à répondre aux besoins humains qui ne sont pas pris en charge par les instances publiques.


11.1 Accueillir et actualiser le salut par étapes


Les chrétiens ne peuvent limiter leur vie spirituelle au simple regard sur le pardon de Dieu obtenu, ni vouloir renouveler une expérience spirituelle de départ tel que cela peut se présenter dans certaines Église pentecôtistes (Ch. 8.3). L’expérience initiale de salut continue et se transforme en un chemin de sanctification. Le croyant doit accepter la condition du voyageur qui poursuit l’actualisation de son salut à différents niveaux[3]. On ne peut se dire sauvé pour demain, le travail est continuel.


Dans l’histoire, les Églises traditionnelles ont fait vivre à leurs membres un cheminement chrétien par étapes. Les étapes, qui comprenaient généralement un cours de formation hebdomadaire de quelques semaines, aboutissaient à la réception d’un sacrement (baptême, eucharistie, confirmation). Mais ces cours de préparation aux sacrements sont-ils aujourd’hui suffisants pour faire cheminer sérieusement les chrétiens ? D’autres cours ne seraient-ils pas nécessaires pour assurer la croissance intégrale des membres de la communauté chrétienne et leur implication dans la mission[4]?


Pour comprendre ce qui est entendu par cheminement par étapes et pour mieux visionner comment faire prendre ce chemin aux personnes de la communauté chrétienne, je propose de regarder l’approche des Alcooliques Anonymes (AAs) qui invite justement leurs membres à passer par une série d’étapes menant à leur libération. C’est une série d’étape similaire, adaptée aux besoins spécifiques du milieu dans lequel est greffée l’Église qui peut être envisagée dans le modèle de croissance intégrale.


La première étape des AAs a pour but de faire admettre aux membres leur impuissance devant l’alcool et la perte de contrôle de leur vie. C’est l’acceptation qu’ils ne peuvent se sauver seul, c’est s’avouer totalement vaincu : L'aveu de son impuissance est le premier pas vers la libération[5].


La deuxième étape du processus de libération chez les AAs est de croire à une Puissance supérieure qui peut rendre la raison et engager la personne qui chemine dans une relation authentique avec Dieu. La troisième étape, elle, suggère de confier sa volonté et sa vie aux soins de Dieu et de lui remettre sa volonté. Pratiquer la troisième étape, c'est déverrouiller une porte pour faire une place à Dieu dans sa vie. La dépendance vis-à-vis de Dieu et la bonne volonté sont considérées comme les voies vers l'indépendance vis-à-vis de l’alcool tout autant que l’effort personnel pour se conformer à la volonté divine.


Les étapes permettent de prendre le chemin du salut et de la transformation intérieure. La quatrième propose de faire un inventaire moral minutieux de sa vie et la cinquième d’avouer à Dieu, à soi-même et à un autre être humain la nature exacte de ses torts. Cette dernière est considérée comme difficile, mais indispensable pour obtenir la sobriété et la tranquillité de l'esprit. Il en résulte le commencement d'une relation nouvelle et authentique avec les autres et avec Dieu, la perte de l'isolement, le calme et le sentiment de la présence de Dieu.


La sixième étape invite à consentir pleinement à ce que Dieu élimine tous ses défauts de caractère. Elle permet le progrès spirituel mais c’est le début d'un travail qui dure toute la vie[6]. On voit ici encore le concept de durée dans le cheminement spirituel. Il ne s’agit pas d’être parfait du jour au lendemain ou de croire que l’on est sauvé pour le reste de sa vie. Il s’agit plutôt de prendre conscience de la différence entre la perfection et le fait de tendre vers un objectif[7]. Dans la septième étape on demande à Dieu de faire disparaître ses déficiences. Une fois encore l'humilité est la route vers la véritable liberté. L'humilité demande de mâter notre égoïsme car la force provient de la faiblesse[8].


Dans les huitième, neuvième et dixième étape, on est invité à dresser une liste de toutes Ies personnes lésées et à réparer ses torts en leur faisant une amende honorable. On apprend ou réapprend à vivre avec les autres et on chemine pour enlever les obstacles aux bonnes relations : répugnance à pardonner; refus d'avouer les torts fait aux autres, oubli volontaire, jugements radicaux, colère, ressentiment, jalousie, envie, apitoiement, humiliation, etc. La Huitième Étape est le début de la fin de l'isolement[9]. L'esprit de la neuvième étape, c’est d’être disposé à assumer les conséquences de son passé et à se rendre responsable du bien-être des autres. Par la dixième étape l'examen personnel devient une habitude régulière afin de patiemment corriger ses défauts[10].


Enfin la onzième étape invite à la prière et à la méditation pour améliorer le contact avec Dieu; on lui demande de nous révéler sa volonté et de nous donner la force de l'exécuter. Généralement, les personnes qui passent par l’ensemble des étapes font l’expérience d’un réveil spirituel. La douzième étape propose alors de transmettre le message et la méthode des AAs aux personnes qui pourraient en avoir besoin et de mettre en pratique ses principes dans les autres domaines de sa vie. La libération est considérée comme un don gratuit qu'on se dispose à recevoir par la pratique des Étapes. On reçoit un nouvel état de conscience et d'être qui permet de résoudre ses problèmes. Il est nécessaire d ‘accorder la priorité au progrès spirituel et de se placer sous la dépendance de Dieu[11].


L’expérience des AAs nous permet de mieux comprendre que pour accueillir le salut et la libération temporelle, un processus d’étapes est une forme adaptée de cheminement. Le salut intégral en Jésus-Christ peut aussi se proposer par une série d’étapes prenant la forme de rencontres ou de cours dont le contenu vise à résorber une pauvreté ou un problème particulier présent dans le milieu. Ces rencontres peuvent être basées sur une conscientisation faite à partir de la Bible, comme dans les CEBs, et répondraient par l’Évangile aux besoins des personnes. Chaque milieu ayant ses problèmes particuliers, c’est à chaque communauté de concevoir ses étapes et le contenu spécifique des rencontres. Grâce à un tel cheminement et à la croissance de ses membres, l’Église pourra lutter efficacement contre les souffrances et les pauvretés de son environnement offrant ainsi un salut intégral.


11.2 La communauté chrétienne : lieu de réponse aux besoins humains


Comme nous l’avons vu, la pauvreté, dans son sens large, peut être comprise comme une ou plusieurs formes de manques : manque du nécessaire, manque de nourriture, d’habillement, de logement; manque de santé, d’amour, de sens à sa vie, etc. Dans un tel état de pauvreté, l’être humain est en état de besoin. Une meilleure connaissance des besoins humains est donc importante pour élaborer un modèle qui lutte contre ces différents niveaux de pauvretés. Nous sommes dans une perspective d’intégration humano-chrétienne[12] qui considère les états de manques comme autant d’entraves à la dignité de la personne et d’obstacles à la croissance humaine. Aimer le prochain, c’est répondre à ses besoins et combattre ce qui nuit à sa dignité et empêche son actualisation.


Le paragraphe qui suit s’inspire du travail de Francine Bélair[13] pour présenter plusieurs besoins pouvant être rejoints par les activités de la communauté chrétienne. Dans son livre Pour le meilleur… jamais la pire : prendre son devenir en main (1996), elle présente une liste intéressante des besoins humains. Il y a d’abord le besoin de survie que l'être humain satisfait en adoptant des comportements comme ceux de manger, de boire, de dormir, de se protéger des intempéries ou des écarts de température grâce à des abris ou à des vêtements[14]. Mais le comportement de survie ne se limite pas à la nourriture, ni au sommeil. Il y a tous ceux que l’on adopte en vue d’assurer sa sécurité comme le fait par exemple l’auteure lorsqu’elle dit stationner son automobile près d'un lampadaire situé le plus près possible de l'entrée afin d'éviter de se trouver seule dans des endroits sombres. Le besoin de survie est donc aussi celui de la sécurité qui se satisfait aussi par l’obtention d’un travail rémunéré. La reproduction est associée également au besoin de survie[15].


Le besoin d'appartenance est le deuxième besoin dont parle l’auteure qui le relie au besoin d’aimer et d’être aimé. Il se traduit par une volonté d’avoir une relation privilégiée d'amour, de camaraderie et d’amitié.


Je me plais maintenant à associer ce besoin d'appartenance avec l'amour inconditionnel. Éprouver le besoin d'appartenance, c'est vouloir être persuadé, au plus profond de soi, que l'on est aimé pour soi-même, peu importe le succès ou l'échec, peu importe notre comportement ou les résultats de celui-ci[16].


Il prend aussi la forme d’une adhésion à un mouvement, à un groupe et à une philosophie de vie[17]. Le besoin d'appartenance peut se traduire, pour certains par un simple contact visuel avec un étranger, par le choix de vêtements, par le fait de posséder un espace personnel. L’auteure le relie aussi à celui de posséder et celui d’être accepté : «Je ne veux pas que mes parents me comprennent, je veux simplement qu'ils m'acceptent.» dit une adolescente en parlant de ses parents. Nous portons tous en nous ce besoin d'amour inconditionnel[18].


Les deux premiers besoins sont en lien avec la pensée de Maslow[19], mais l’auteure va parler aussi du besoin de pouvoir. Il est l'émotion reliée à l'expression d'un comportement à la recherche d'une certaine forme d'influence[20]. Il peut englober des réalités aussi différentes que le pouvoir politique, la domination prise dans le sens de l'exercice du pouvoir sur les choses ou sur les personnes, le pouvoir sur sa propre vie, sur ce qui peut nous détruire : alcool, drogue, excès de nourriture, ambition démesurée et autres passions, ou encore le pouvoir de maîtriser des compétences et d'être quelqu'un dans la vie[21]. L'être humain peut exercer du pouvoir sur son corps : il apprend à le soigner, à l'habiller, à le maquiller, à le maintenir en forme, à lui faire faire de l'exercice, et sur son environnement matériel :choisir un fond d’écran sur l’ordinateur, mettre de l'ordre sur son bureau, faire la cuisine, acheter des vêtements, décorer une pièce. Le besoin de pouvoir est aussi relié à celui d’être efficace et d’obtenir des résultats. Elle explique que l'individu doit passer de la parole aux gestes, des idées aux réalisations :


Être écouté, apprécié, reconnu ne suffisent plus, c'est l'heure de l'accomplissement. À cette étape, l'individu veut être maintenant le bâtisseur, l'innovateur. Il veut démontrer ses capacités de façon concrète, être en compétition avec son environnement, apprendre, s'améliorer, grandir, se réaliser[22].


Ensuite Francine Bélair parle du besoin de plaisir qui se traduit aussi par le besoin de joie.


Le besoin de plaisir fait référence au fait de rire, de faire des blagues, d'avoir le sens de l'humour, de pouvoir dédramatiser des situations difficiles, de recadrer les événements, et aussi d'éprouver de la satisfaction après un dur labeur. Le plaisir, c'est aussi jouer, et même apprendre. Il n'est pas rare, en effet, surtout chez les enfants, que l'apprentissage soit synonyme de jeu. Le plaisir, c'est aussi le petit frémissement que l'on éprouve au creux du ventre, le pétillement dans les yeux de l'autre, le soupir de satisfaction devant la toile terminée, le grand sourire[23].


Trouver une solution ou entrevoir un bien-être à l'horizon. Le plaisir n'est pas synonyme de facilité, au contraire, il passe par l’effort et la compétition qui ne tuent pas le plaisir dans la mesure où ils ne sont pas imposés de l'extérieur.


Un autre besoin est celui de liberté. Ce besoin s'exprime par le désir de faire des choix, de se mouvoir, d'orienter sa vie, d'accéder à des choix. Il est intimement lié à la notion de responsabilité et s’exprime dans les choix personnels et l’acceptation de leurs conséquences. La liberté n'est pas le libre choix sans contraintes ni obligations. Le choix en effet est fait entre plusieurs options extérieures et plusieurs motivations intérieures qui, elles, entraînent certains types d’obligations et de contraintes.


Francine Bélair ne parle pas du besoin de transcendance, mais la liste exprimée ici n’est pas exhaustive. Expliquer ou définir les besoins fondamentaux de la personne humaine est une entreprise difficile et délicate. Nombreux sont les auteurs qui ont proposé différentes catégories pour les classifier[24], et il est plus prudent de se situer dans une approche non dogmatique qui fait appel au discernement. En effet, les besoins peuvent varier d’une personne à une autre et il faut aussi savoir prendre le temps de repérer ceux qui sont spécifiques à un environnement particulier.


Les besoins font partie du processus d’actualisation de la personne. Tous et chacun sont une sorte d’appel à l’actualisation, et contrairement à ce que laisse penser la pyramide de Maslow, nous ne construisons pas nos besoins sur la réalisation d'autres besoins. Il s’agit de relativiser l’idée d’une hiérarchie dans les besoins. La réalisation de tous est essentielle pour assurer la croissance intégrale et tous sont présents en même temps même si certains peuvent être prédominants selon la situation ou la carence du moment.


Si le besoin de survie était le besoin le plus important chez les êtres humains, explique Francine Bélair, le suicide n'existerait pas. Un jour, alors qu’elle parlait dans une conférence de la nécessité de considérer l’ensemble des besoins en même temps, un homme s'est levé dans la salle où elle donnait sa conférence et dit : «Je travaille dans une maison qui accueille des itinérants. A leur arrivée, ils n'ont parfois pas mangé ni dormi depuis plusieurs jours. Je vois difficilement comment ne pas penser que leur besoin de survie n'est pas alors le besoin le plus important à combler!» Elle lui a alors demandé de lui décrire comment il accueillait ces personnes. L'homme s'est levé et s'est dirigé vers un autre participant. Il lui a mis la main sur l'épaule et d'une voix douce lui a dit: «Tu es chez toi ici (appartenance), si tu as le goût de parler, il y a quelqu'un pour t'écouter (écoute/pouvoir), si tu préfères (liberté) manger ou dormir (survie) d'abord, c'est ton choix (liberté), tu n'es pas obligé.»[25]. En se rendant compte de ce qu’il venait de décrire, l’homme sourit en ajoutant: «C'est vrai, certains préfèrent parler d'abord et manger ensuite!».


L’approche de Francine Bélair nous apprend qu’il est nécessaire de considérer les différents besoins de manière plus circulaire que hiérarchique. Ils sont tous ensemble présents, en même temps, dans la personne à différents degrés, et l’intensité de chacun d’eux varie selon la situation unique de la personne. Grâce à cette classification, il est aussi plus facile de comprendre comment lutter contre les états de manque qui sont autant de niveaux de pauvretés qui empêchent l’actualisation et la croissance des êtres humains. En répondant à ces besoins, la communauté chrétienne manifeste l’amour de Dieu au monde et offre ainsi un salut vraiment intégral.


Les activités de l’Église, y compris les cours offerts, devront idéalement viser à répondre aux différents besoins de la personne. L’Évangile est un des moyens propres à l’Église qui permet de réaliser cela; par exemple, un des besoins qu’il peut combler est celui du pardon et de l’amour. En Jésus se trouve le pardon définitif, complet et éternel de Dieu pour une personne qui souffre de culpabilité. Et nous ne pouvons trouver une plus grande preuve d’amour de la part de Dieu qu’en Jésus (Jn 15 :13[26]).


En offrant aux membres de la communauté chrétienne une formation basée sur l’Évangile, on répond à leur besoin de croissance et d’approfondissement spirituel; en les impliquant dans la mission, on répond à leur besoin d’accomplissement, par des célébrations liturgiques axées sur la louange, on répond à leur besoin de joie. Il y aurait d’autres exemples d’activités propres à l’Église pouvant rejoindre les besoins humains, mais ce qui est important de voir ici c’est que pour offrir un salut intégral, les activités ecclésiales devraient êtres conçues à partir des besoins et des aspirations de la personne. Nous y reviendrons plus loin…


11.3 Éviter le piège de la religion fonctionnelle


Dans un modèle ecclésial qui propose de répondre aux besoins de la personne, il peut y avoir un danger : celui de la religion fonctionnelle. En offrant de réaliser besoins et aspirations, même s’ils sont légitimes, on peut encourager une relation fonctionnelle avec Dieu, c’est-à-dire à de se servir de Dieu pour ses intérêts. Il se pose, autant que dans la recherche de croissance numérique, un problème de sens à la lumière de l’Évangile. La personne reste centrée sur elle-même.


Il s’agit d’éviter de tomber dans le piège d’une expérience religieuse illusoire. André Godin explique qu’une religion fonctionnelle offre des croyances et une relation à Dieu qui ont simplement pour but d’accomplir des désirs, de combler des manques et d’apaiser des angoisses[27]. Elle place Dieu en position de donner du sens à ce qui serait absurde par ailleurs, d'esquiver illusoirement la condition mortelle, de cimenter des sociétés, et même, finalement, de faire fonctionner des institutions ou des groupes religieux. Certes, la relation avec un tel Dieu peut culminer dans un sentiment d'adoration et de reconnaissance, mais elle maintient l’individu sur un axe de dominance-soumission qui s'ouvre difficilement à l'amour[28].


C’est un fait courant de tenter d’utiliser Dieu pour arriver à ses fins : qui ne fait pas de prière pour obtenir des réussites en tout genre : examen, emploi, mariage, ou la protection contre le malheur, les maladies et la mort[29]. Certes, l’Évangile nous encourage à demander (Mat 7:7-8[30]), mais ce n’est pas pour mettre Dieu à son service ou pour combler un simple désir d’expériences spirituelles sensible. Une telle attitude peut véhiculer un cortège d'illusions masquées[31]. Il s’agit d’être prudent et de discerner de quelles expériences il s’agit : Expérience du moi ? Expérience de Dieu? De quel Dieu?


Les pratiques sacramentelles et orantes peuvent s’en trouver subverties facilement:


1) Relation de causalité automatique entre le signe matériellement posé (confession sans aucun repentir) et l'effet spirituel (bien-être psychologique plus ou moins confondu avec le don divin);


2) Relation de causalité entre un sacrement reçu, l’eucharistie, par exemple, et un effet d'ordre matériel : protection contre les malheurs de la vie;


3) Régression de la prière à un niveau fonctionnel, uniquement centrée sur soi : « Que ma volonté se fasse avec l'aide de Dieu » et infiltrée de mentalité magique : « Que ma volonté se fasse ».


Si une Église propose un chemin de croissance et d’actualisation qui fait correspondre besoins humains et cheminement de foi, il sera important de rester prudent. L'être humain prête facilement à Dieu des désirs qui comblent ses propres besoins. Il pourrait ne s'identifier à aucun désir « autre » que les siens. Il ne peut y avoir de maturité chrétienne sans ouverture, sans don de soi, à l’image de Jésus qui a aimé jusqu’à donner sa vie. S’il est bon que les responsables organisent la communauté pour qu’elle lutte contre les pauvretés du milieu en essayant de combler les manques et de répondre aux besoins des personnes, il ne faut pas pour autant proposer un Évangile qui ne soit qu’une recherche égoïste de soi. Le cheminement chrétien est une actualisation du salut dans les différents niveaux de la vie et une croissance dans l’amour, donc dans l’ouverture à l’autre.


Une croissance authentique ne propose pas le chemin inverse : une négation totale de soi, de ses besoins et de ses désirs. La gloire de Dieu c’est l’homme vivant (S. Irénée, hær. 4, 20, 7), Dieu ne veut pas la mort de l’être humain (Ez 18:32[32]). C’est l’esprit avec lequel on entre en communion avec Dieu qui est à purifier si la relation à Lui est seulement basée sur la recherche de ses propres intérêts sans jamais s’ouvrir à ceux des autres.

Pour éviter de confondre la volonté de Dieu avec la sienne et de se situer dans une fonctionnalité religieuse, il est nécessaire de discerner ce qui relève d’une volonté d'accomplissement de désirs compensatoires et ce qui relève d’une ouverture authentique à l'Autre. L'aspect fonctionnel de la religion, avec son cortège d’illusions, peut voiler longtemps le mouvement vers la découverte et la connaissance de Dieu. La prière fonctionnelle devrait, par la maturité progressive du croyant, le conduire plus loin; dans ce sens l'inexaucement peut devenir source de sagesse, il sert à progresser vers l'attitude ordinairement réclamée du croyant : Que Ta volonté soit faite ! Selon le psychanalyste Th. Reik, l’évolution de l'homme vers sa maturité religieuse présente trois mutations du désir: a) Que ma volonté se fasse - b) Que ma volonté se fasse avec l'aide de Dieu - c) Que Ta volonté se fasse[33].


Pour échapper à la religion fonctionnelle et à la mentalité magique, il s’agit de proposer aux personnes qui font un cheminement dans la communauté de se mettre à la place du Christ, de s'identifier à Celui qu'on désire aimer selon ses désirs à lui. C’est ce qui s’appelle la conversion chrétienne du désir[34]. Une telle étape de conversion devrait faire partie du cheminement proposé. Cette conversion, ce cheminement, requiert une confrontation constante entre les désirs du Père et les désirs de celui qui prie. Le renoncement est alors le pivot de la conversion. À partir du désir de l'Autre, le mouvement s'amorce dans une transformation graduelle des demandes[35]. Dieu est rencontré dans sa différence. Ainsi les conduites ou les expériences religieuses peuvent prétendre, comme c'est le cas dans l'amour accompli, faire dépasser la subjectivité et instaurer une alliance transformante entre la personne et une réalité qui est autre que les propres besoins du sujet.


Si le message chrétien est présenté comme libération de ce qui entrave l’actualisation du salut et comme accomplissement des besoins humains légitimes, il sera nécessaire de préciser que l'attachement à la réalisation de ses désirs ne suffit pas pour progresser. Une mutation doit intervenir pour transformer les désirs personnels, afin qu’ils correspondent aux désirs de Dieu[36]. C’est dans ce sens que le discours chrétien peut réellement parler de désir et de besoin. Parmi ces désirs, celui d’une volonté de partager le salut reçu et d’aider les plus démunis se démontrerait particulièrement apte à structurer l’expérience chrétienne en la faisant échapper à la critique freudienne des illusions.


11.4 Cheminement vers l’actualisation et fonctions de l’Église


Pour déterminer les actions de l’Église locale, le processus a souvent été de partir des fonctions de l’Église plutôt que des besoins humains. Mais dans le modèle de croissance intégrale proposé on souhaite tenir compte des besoins du milieu. Idéalement il devrait y avoir symbiose entre les fonctions de l’Église et les besoins spécifiques du milieu. Regardons maintenant ce que l’on entend par fonction de l’Église. Selon Thom Rainer, il y en a quatre : la liturgie, le service social, l’évangélisation et la formation des disciples[37]. Selon Georges Peters un autre auteur du MCE, elles concernent Dieu (célébration, adoration, louange, intercession, la communauté chrétienne), la communion fraternelle, l’éducation chrétienne, l’édification, la discipline chrétienne et le monde environnant (évangélisation, service, instruction, jugement moral)[38]. Dr Don Hoke insiste sur un élément important : les fonctions de l’Église doivent déboucher sur une action dans le monde[39]. Le soin pastoral de la communauté, l’éducation chrétienne et la liturgie sont appelés à créer un élan d’amour qui rejaillit sous forme de mission, à l’image de la Trinité dont l’amour fécond rayonne sur le monde.


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Rick Warren, pour sa part, déduit les fonctions de l’Église des buts de l’Église. S’appuyant sur certains passages bibliques (Mat 22:37-40[40] et Mat 28:19-20[41]), il estime que la communauté chrétienne a cinq buts : Aimer Dieu de tout son cœur, aimer son prochain comme soi-même, faire des disciples, les baptiser et leur apprendre à obéir aux préceptes chrétiens. C’est de ces cinq buts qu’il déduit les fonctions de l’Église : Célébration liturgique - Mission comprise comme évangélisation - Incorporation des membres à l’Église (Baptême et engagement vis-à-vis de l’Église locale) - Éducation vers la maturité chrétienne - Ministères de services des membres de la communauté chrétienne.


Le point de vue de Rick Warren est intéressant, car il ne conçoit aucune des fonctions de l’Église sans l’implication de l’ensemble des membres de la communauté. La structure et les activités de son Église locale ne peuvent tout simplement pas fonctionner sans les laïcs. Un autre élément intéressant, c’est que la manière dont il conçoit les fonctions de l’Église permet de rejoindre les besoins de ses membres et ainsi facilite leur implication. Quels sont les besoins humains qui sont rejoints par ces fonctions ? C’est ce que nous allons voir dans le tableau qui suit où les besoins sont classifiés en sept catégories :

  1. Survie (temporelle et éternelle) : Guérison, salut, sécurité, possession
  2. Transcendance : Relation à Dieu
  3. Amour : Aimer et être aimé, être pardonné et accepté, appartenance à un groupe
  4. Pouvoir : Maîtrise de soi, connaissance, réalisation, réussite, efficacité, résultats
  5. Plaisir : Joie, paix, confort
  6. Sens et Utilité
  7. Liberté : dignité et responsabilité

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Il ne s’agit pas ici d’une présentation exhaustive des besoins rejoints par les fonctions de l’Église de Rick Warren, mais on voit que l’on peut concevoir les fonctions de l’Église en tenant compte des besoins humains. Les efforts du pasteur sont louables car la manière dont son Église est structurée permet de faire prendre aux chrétiens le chemin de la croissance spirituelle et de l’implication dans la mission. Il insiste sur l’importance de faire des disciples et pour lui un disciple c’est un chrétien impliqué dans la mission. Il a aussi défini les buts de son Église non seulement à partir de l’impératif missionnaire de l’Évangile de Matthieu mais aussi sur les deux plus grands commandements de la Loi. Mais hélas, on ne sort pas d’une approche fortement numérique qui donne la priorité quasi-absolue à l’évangélisation[42]. La dimension sociale n’est pas évidente à première vue dans sa conception des fonctions de son Église. Il est à mon avis nécessaire d’aller plus loin et d’équilibrer le modèle en définissant aussi les buts de l’Église à partir de la parabole du jugement dernier (Mat 25:31-46) comme l’ont fait les Missionnaires de la Charité.


La façon traditionnelle en théologie de comprendre les buts de l’Église est de remonter aux grands titres de Jésus. À Jésus prophète correspond la fonction prophétique de la mission ecclésiale : évangélisation, catéchisation, interprétation. À Jésus grand prêtre, correspond la fonction cultuelle de la mission ecclésiale: prière et offrande spirituelle de la vie, liturgie et sacrements. À Jésus roi et Seigneur, en lien avec le Règne de Dieu qu'il inaugure sur l'Église et sur le monde, correspond la fonction royale de la mission. À Jésus pasteur de la partie de l'humanité qui accepte de le suivre dans le rassemblement communionel effectif de l'Église, correspond la fonction communautaire de la mission : formation, consolidation et gouverne de la communauté, sollicitude pour elle, entr’aide et services. À Jésus sauveur, guérisseur et libérateur correspond la fonction socioculturelle de la mission ecclésiale: humanisation et libération au service du monde[43].


On retrouve ainsi quatre grandes fonctions de l’Église[44]:


1) La fonction prophétique, qui tient en trois pôles : I'évangélisation première pour un appel à la foi et à la conversion aux exigences évangéliques; la catéchisation, ou enseignement et discours chrétien articulé ; I'interprétation : discernement; interprétation des sources chrétiennes, interprétation de la vie à la lumière du sens chrétien, réinterprétation des croyances pour un discours chrétien pertinent.


2) La fonction cultuelle, qui est la fonction d'animation du culte spirituel : prière et liturgie.


3) La fonction hodégétique, qui est la fonction communautaire, c'est-à-dire de conduite ou de gouverne de la communauté, axée sur le service de la charité « ad intra » ou d’entr'aide[45]. Elle concerne I'intégration de la communauté et le service de la fraternité : la prise en charge des services de la communauté et des formes d'entraide envers ses membres.


4) La fonction socioculturelle, qui est la fonction de service au monde, dans les structures de la société, en dehors des frontières de l'Église. Elle est service de la charité «ad extra»[46] qui implique deux pôles : I'humanisation ou le service humanitaire; et la libération ou l'entreprise de transformation.


Comme le souligne justement André Charron, la diversification et l'intégration des quatre fonctions doivent être maintenues dans la mission de toute communauté si l'on ne veut pas tronquer la mission d'une de ses composantes essentielles[47]. À partir d’une telle grille et en tenant compte des besoins humains, il sera plus facile d’élaborer un modèle qui met l’accent non seulement sur l’évangélisation, mais qui accorde à chacune des fonctions de l’Église une place égale.


Regardons aussi comment la prise en compte du texte de la parabole du jugement dernier (Mat 25:31-46) permet de remettre en avant la fonction sociale de l’Église.


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Le dernier tableau intègre tous les éléments dont nous avons parlé : besoins de la personne, activités ecclésiales, et fonctions de l’Église, afin de montrer que l’on peut effectivement partir des besoins humains pour définir les activités de l’Église, tout en respectant les exigences de la mission chrétienne et donner à chacune des fonctions ecclésiales une importance égale. Grâce à une telle approche nous en arrivons à un modèle d’Église qui est au service de la personne et de ses besoins et où la dichotomie entre proclamation et œuvres est dépassée.


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Le tableau, qui pourrait être encore enrichi de nouvelles activités, montre combien il est nécessaire de penser la structure de l’Église au moins autant en fonction des personnes que des textes bibliques. L’Église sera ainsi porteuse d’un sens plus grand que si on organise la communauté seulement à partir de préceptes bibliques qui, mal interprétés, peuvent mettre la personne au service de l’Église plutôt que le contraire. Dans le modèle de croissance intégrale, les activités de l’Église sont mises sur pied, non seulement selon les fonctions de l’Église, mais aussi selon la culture et les besoins présents dans le milieu.


11.5 Conclusion


Pour lutter contre les pauvretés observées dans l’environnement, l’Église locale mettra sur pied des activités qui visent à répondre aux besoins des personnes tant à l’extérieure de la communauté chrétienne qu’à l’intérieur. Parmi celles-ci, il y aura une série de cours permettant de franchir des étapes de libération et de croissance. Leur contenu sera élaboré en fonction des détresses, des souffrances observées et des différentes sortes de manques qui empêchent l’actualisation de la personne. Chaque milieu ayant ses propres problèmes, c’est à chaque communauté de déterminer le nombre des étapes et le contenu des cours. On peut envisager des rencontres hebdomadaires d’une ou deux heures s’étalant sur une année. Elles viseraient à aider les personnes à accueillir le salut et la bénédiction de Dieu dans les différents domaines de leur vie. Une conscientisation, faite à partir de la Bible, contre ce qui opprime les personnes et empêche leur actualisation, répondraient ainsi à la fin visée. Des thèmes reliés au kérygme y seront aussi abordés; par exemple : l’amour de Dieu, la personne de Jésus, ce qu’est un chrétien, le repentir et la foi, l’amour du prochain, les dons de l’Esprit, etc. La formation devra aussi permettre de préparer les membres à exercer des ministères laïcs correspondant aux fonctions de l’Église et à leur besoin de réalisation.


De cette manière, la communauté chrétienne deviendra à la fois un lieu de cheminement et de formation et à la fois une base d’intervention missionnaire pour s’attaquer, avec l’ensemble des baptisés, aux différentes formes de pauvretés rencontrées dans le milieu. La question qui se pose maintenant est : dans une telle approche, dans un tel modèle, quelle est la place accordée à la croissance numérique ? C’est ce que nous allons préciser dans le prochain chapitre.




NOTES

[1] Le terme cours fait référence à un genre de formation qui existe déjà dans les paroisses pour préparer les personnes à recevoir les sacrements : cours de préparation au mariage, à la première communion et à la confirmation. Il existe aussi les cours bibliques.

[2] Comme il a été signalé dans le chapitre X, la pauvreté est comprise dans son sens large : matériel, humain et spirituel.

[3] Cf. M. Dagras, op. cit., p. 115.

[4] Une série de cours est ainsi proposé dans la communauté de Rick Warren pour aider les membres à croître dans la vie chrétienne, à être fidèle à l’Église locale, à découvrir leurs dons et à s’impliquer dans la mission.

[5] Les douze étapes et les douze traditions, Montréal, Les services des publications françaises des AA du Québec, 1981, p. 5.

[6] Ibid., p. 7.

[7] Ibid., p. 7.

[8] Ibid., p. 7.

[9] Ibid., p. 7.

[10] Cf. ibid., pp. 7-8.

[11] Ibid., p. 9.

[12] L’expression intégration humano-chrétienne fait partie du titre d’une thèse de doctorat écrite par Amanda Brideau. qui défend l’idée d’un message de salut chrétien s’insérant dans les dynamiques de croissance humaine : La vie de parachèvement apportée par la participation à la vie même de Jésus-Christ inclut les réalités humaines tout en leur donnant une finalité d’un bonheur inimaginable (p.326).

[13] Francine Bélair est membre du corps professoral de l’Institutte for Control Theory, Reality Therapy and Quality Management de LosAngeles.

[14] F. Bélair, Pour le meilleur… jamais la pire : prendre son devenir en main, Montréal, les éditions de la Chenelière inc.,1996, p.15.

[15] Cf. ibid., p.15.

[16] Ibid., p.17.

[17] Cf. ibid., p.16.

[18] Ibid., p.19.

[19] La pyramide des besoins de Maslow est un classique pour décrire les besoins humains : besoins physiologiques, de sécurité, d’appartenance, d’estime de soi, de réalisation de soi (actualisation et transcendance) : A .H. MASLOW, « A theory of Human Motivation », Psychological Review, vol.50 (1943), pp. 370-396 et A.H. MASLOW, Motivation and Personality, New-York, Harper & Row Publishers, Incorporated, 1954.

[20] Ibid., p.19.

[21] Cf. ibid., p.19.

[22] Ibid., p.24

[23] Ibid., pp.24-25.

[24] Il y par exemple Henri Piéron (1935), Henry A . Murray (1938), Raymond B. Catell (1957), J.P. Guilford (1975), sans parler d’Abraham H. Maslow (1943).

[25] F. Bélair, op. cit., p.29

[26] Jn 15:13 : Nul n'a plus grand amour que celui-ci : donner sa vie pour ses amis.

[27] Cf. A. GODIN, Psychologie des expériences religieuses : Le désir et la réalité, Paris, Éditions Le Centurion, 1981, p. 268.

[28] Cf. ibid., pp. 64-65.

[29] Cf. ibid., p. 44.

[30] Mt 7:7-8 : Demandez et l'on vous donnera ; cherchez et vous trouverez ; frappez et l'on vous ouvrira. Car quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; et à qui frappe on ouvrira.

[31] Cf. A. GODIN, op. cit., p. 24.

[32] Ez 18:32 : Je ne prends pas plaisir à la mort de qui que ce soit, oracle du Seigneur Yahvé. Convertissez-vous et vivez !

[33] Cf. T. REIK, “From Spell to Prayer”, dans Psychoanalysis, 3 (4) 1955, pp.3-26.

[34] Cf. A. GODIN, op. cit., p. 241.

[35] Cf. ibid., pp. 233-334.

[36] Cf. ibid., p. 241.

[37] Cf. T. RAINER, op. cit., p. 148.

[38] Cf. G. W. Peters, A Theology of Church Growth, Grand Rapids, Zondervan Publishing House, 1981, p. 186.

[39] Cf. ibid., p. 247.

[40] Mat 22:37-40 : Jésus lui dit : " Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit : voilà le plus grand et le premier commandement. Le second lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. A ces deux commandements se rattache toute la Loi, ainsi que les Prophètes. "

[41] Mat 28:19-20 : Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous prescris. Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu'à la fin du monde.

[42] Les activités de son Église sont évaluées par des questions comme celles-ci : Combien ? Combien de plus par rapport à l'année dernière ? Combien de personnes avons-nous amené à Christ ? Combien y a-t-il de nouveaux membres ? Combien d'entre eux font preuve de maturité spirituelle? Quels sont les signes de maturité que nous recherchons ? Combien ont été équipés et mobilisés pour le ministère ? Combien remplissent leur mission dans le monde? (R. WARREN, op. cit., pp. 107-108.

[43] Cf. A. CHARRON, « La spécificité pastorale du projet d’intervention » dans la collection : Cahiers d’études pastorales (vol.5), La praxéologie pastorale : Orientations et parcours / sous la direction de Jean-Guy Nadeau, Tome II, Montréal, Fides, 1987, pp.165-166.

[44] Cf. ibid., pp.166-167.

[45] Ibid., p.167.

[46] Ibid., p.167.

[47] Cf. ibid., p.167.