Annexe 3 : Le modèle systémique

Le modèle systémique est centré sur l'adaptation d'une tradition vivante à un contexte changeant. L'évangélisation et l'éducation de la foi sont accentuées. L'Église y est vue comme un organisme vivant en interaction avec un milieu. Les communautés locales sont à faire mais en fonction du milieu et d'un projet; un projet commun unifie les communautés locales qui ont une autonomie créatrice pour la réalisation. Le lien à la société est de l'ordre d'une interdépendance, non d'une conquête comme dans le modèle traditionnel ou d'un repli comme dans le modèle sectaire. La foi chrétienne est vécue comme une force de transformation de la culture. Le changement y est important car l'organisme doit s'adapter continuellement au contexte; cela suppose un travail d'interprétation du contexte et de la tradition.

Le leadership valorisé est celui de gens compétents et conscients, capables de comprendre ce qui se passe dans le milieu et l'organisme; le modèle implique une grande diversité de responsables avec des motivations partagées à tous les niveaux. Le rôle des responsables est de maintenir le cap sur la visée, de clarifier les buts et de soutenir les changements; il touche d'abord les perspectives d'ensemble et la coordination. Les conflits sont dépersonnalisés et réglés en fonction des finalités; les débats sont vus comme sains car sources de renouvellement et d'adaptation. Pour les édifices, flexibilité et mobilité sont valorisées: lieux partagés avec d'autres, édifices à usage multiple. L'image biblique de l'Église est celle du corps du Christ.

Ce modèle est sous-jacent à plusieurs efforts de renouvellement et de restructuration tant locaux que diocésains présentés dans la recherche-action et la prise de parole. Bien qu'il ne le recoupe pas complètement, il est plus en affinité avec le projet ecclésial d'engagement social car il suppose un groupe plus articulé, capable d'analyser son milieu et d'interpréter la tradition chrétienne en lien avec le contexte actuel. Il implique un leadership plus ferme et clair que le modèle humaniste. Moins personnalisé que le modèle sectaire, plus souple que le modèle bureaucratique et plus varié que le modèle traditionnel.

Il suppose une clarté des options pastorales et une volonté de présence signifiante dans le monde en rapport non seulement aux individus, comme le modèle humaniste, mais aussi à la culture comme telle. Il a ses limites: I'obsession de la prospective, I'importance de l'expertise, le changement permanent. Mais il permet la solidarité et le risque, la sensibilité aux groupes, I'attention au contexte. Pour l'avenir, un modèle de ce genre serait plus apte à favoriser une cohérence dans les options et un passage plus décidé et organisé vers d'autres styles de communautés et d'engagement.

Comité de recherche de l’assemblée des Évêques du Québec sur les communautés chrétiennes locales, Risquer l’avenir, Montréal, Éditions Fides, 1992, pp. 113-114.