7.2.2 Amour et sens de la vie

Pour Frankl, on peut trouver un sens à sa vie non seulement dans la poursuite d’un but, mais aussi dans l'amour. L'expérience serait aussi valable que la réalisation et aurait même des vertus thérapeutiques, parce qu'elle nous oblige à mettre l'accent sur le monde intérieur plutôt que sur le monde extérieur de l'accomplissement[32]. Malheureusement, dans notre société, la considération que l’on a pour une personne, ou la valeur qu’on lui accorde, est habituellement définie en regard de son travail et de sa contribution. La société moderne chérit les individus efficaces, prospères et heureux. En fait, elle ne fait pas la différence entre la valeur d'une personne et son utilité.

Frankl a découvert dans les camps de concentration que l'amour est le plus grand bien auquel l'être humain puisse aspirer. L'être humain trouve son salut à travers et dans l'amour. Un homme à qui il ne reste rien peut trouver le bonheur, même pour de brefs instants, dans la contemplation d’une personne qu’il aime. Lorsque son seul mérite consiste à endurer ses souffrances avec dignité, il peut éprouver des sentiments de plénitude en contemplant l'image de la personne aimée. Dans les camps, grâce à sa vie intérieure, le prisonnier pouvait se protéger du non-sens, de la désolation et de la pauvreté de son existence[33].

Dans l’Église, si la dimension de réalisation numérique prend plus de place que celle de l’expérience de l’amour et de la fraternité il n’est pas étonnant qu’il y ait une perte de sens. L’enseignement de Frankl est éclairant quant au but de l’action pastorale et missionnaire et si l’efficacité est actualisante, comme le dit Yves St-Arnaud, celle-ci devrait être recherchée plus au niveau de l’expérience intérieure que de la réalisation extérieure.


NOTES

[32] Cf. ibid., pp. 145-146.

[33] Cf. ibid., pp. 55-56